Quels sont les enjeux rhétoriques d’un débat dit contradictoire ? Pourquoi est-on convaincu ou persuadé après le passage d’un très bon orateur en public ? Quels sont les moyens pour arriver à maîtriser cet art de l’éloquence ? Ne bougez pas, cet article est fait pour vous.
1) Le débat est un outil d’éloquence puissant qui a pris ses sources dans la Grèce Antique, avec les assemblées adelphiques.
La finalité du débat est in fine le changement d’opinion du public. Pendant un débat, le public est amené à réviser sa position concernant son opinion. Si cela ne change pas la position tenue des protagonistes, le débat permet, par l’art rhétorique, la présentation de tous les arguments intéressants au public des motions POUR & CONTRE. Le débat rhétorique amène un camp à gagner par la conviction et la justesse de ses prises de parole. Il ne se gagne pas par ses compétences sur le sujet donné ou par son autorité sur le sujet. Exemple : un juge qui débattrait sur un sujet de la justice ne fait pas de lui un bon débatteur. Car, c’est ce qu’on appellerait dans le langage commun, un sophisme.
Configuration
Un débat est une confrontation de deux équipes de personnes. L’une prend la motion POUR, l’autre prend la motion CONTRE. Afin qu’il soit équilibré, il est nécessaire d’avoir le même nombre de personnes dans les deux équipes. Chaque équipe nommera son capitaine, ce qui la représentera lors de l’introduction et la conclusion du débat.
Un débat se gagne certainement s’il est travaillé en amont. Un débat non travaillé en amont est d’avance un débat perdu. Car chaque équipe travaille son argumentaire avant le débat. Pendant le débat, elle a la tâche d’ajuster son attaque par rapport à ce qui est dit par l’adversaire. Dans les faits, l’équipe étudie l’argumentaire de l’adversaire. Elle va chercher tous les arguments possibles et imaginables. Et elle va tenter de les contrer sur le papier. Une fois ce premier travail terminé, l’équipe va chercher à déstabiliser l’autre camp par plusieurs possibilités.
Outils du débat
– La preuve forte. C’est la carte maîtresse du débat. Une preuve forte est un moyen irréfutable car c’est un fait incontesté et reconnu par la société. La signature d’un traité entre deux pays, la mise en valeur d’un article de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, de la promulgation d’une loi sont des preuves fortes qui peuvent être exploitées astucieusement dans un débat.
– La preuve faible. Accumulées et sourcées, elles peuvent faire la différence dans un débat. Cela peut signifier que l’orateur doit en amener la preuve devant son public, la définir et l’expliciter. Il peut s’agir d’un article de journal, d’un cabinet d’experts indépendants, d’une revue spécialisée. Mais aussi, l’objet d’un consensus scientifique, une vidéo d’un média connu et reconnu, le témoignage de quelqu’un, un objet culturel dont la représentation par l’image peut appuyer l’exposé d’un argument.
– La mise en dérision de l’argumentaire du camp opposé. Utilisé correctement, il permet de rendre illusoire ou abscons le propos du camp d’en face. Ce qui amène le public à prendre en compte ce nouvel angle d’attaque. La preuve par l’absurde, la preuve par l’irréalisable ou l’utopie, et la preuve par l’archaïsme sont de bonnes méthodes pour contrer un argumentaire.
– Votre savoir être avec la simplicité, l’intelligence du cœur, l’humilité et l’autodérision.
Ce qu’il ne faut pas faire (contre exemples)
– Tout type d’argument non sourcé ou basé sur des allégations fallacieuses risquerait d’être contre productif et amener le public, sciemment informé, à douter.
– Toute attaque contre une personne, et non sur l’idée ; risquerait la disqualification de l’équipe sur un débat, en plus d’indigner une partie du public.
2) Techniquement, comment se passe un débat ?
Tour à tour, les deux capitaines vont prononcer un discours d’introduction de trois minutes pour exprimer et développer chaque motion. Donc, l’un après l’autre, la motion du POUR est présentée, suivie de la motion du CONTRE. Cette explication, face au public, est nécessaire. Il faut installer le sujet et informer le public de l’intention et délimiter le périmètre de discussion. Par conséquent, le public rentrera dans un environnement qui se prête au débat.
Ensuite, en alternance motion POUR et CONTRE, les débatteurs auront la possibilité de prendre une fois la parole pendant trois minutes maximum, pour exprimer un seul argument. L’ordre des débatteurs doit être décidé par l’équipe. La sélection des arguments les plus pertinents et les plus efficaces fait partie de la gestion d’équipe, face à l’équipe adverse.
Pendant le débat, les capitaines peuvent changer du placement de tel ou tel argument. Ce cas de figure apparaît si celui-ci est une proie facile pour l’équipe adverse. Ou bien, si celui-là a un meilleur angle d’attaque. Cette tactique doit être établie bien des jours avant le débat. Et les protagonistes évolueront plus facilement en cours de celui-ci. Quand tous les débatteurs sont passés, les capitaines résument leur argumentaire général. Il se solde par une conclusion de trois minutes. Ceux-ci vont rechercher les moments importants passés du débat et convaincre ainsi le public une dernière fois.
3) Comment gagne-t-on un débat ?
Le public est conquis s’il approuve de la tête, sourit ou s’il applaudit. En évidence, la performance spontanée des orateurs qui se succèdent tour à tour. C’est un indice de confiance dans la tenue du débat par les deux équipes. Les capitaines pourraient s’en servir pour enfoncer le clou sur un argument qui s’est soldé par une réussite décisive. De même, remuer le couteau dans la plaie lorsque l’équipe adverse se défend mal en ajoutant un peu d’humour. Cela permet de distraire le public et l’amener à être plus conciliant à son point de vue. Mais l’équipe ne peut pas miser que sur de l’humour. Elle peut marquer des points à son avantage et faire travailler l’imagination du public mais guère plus. L’équipe ne peut gagner que si son travail de présentation de ses arguments est éloquent.
En conclusion, un débat se gagne par le sérieux de l’équipe de la motion. La précision de ses arguments doit être solidement appuyée par les sources obtenues, préparées en amont. La délicatesse et l’audace de son art de l’éloquence sont mis en avant. Pour les enjeux rhétoriques, nous pouvons citer plusieurs outils qui ont fait leurs preuves. Le français et sa singularité, les figures de style dont l’anaphore, l’emphase (le ton et l’ordre des mots employés), la métaphore, la comparaison, l’hyperbole, la mise en abyme, l’oxymore et la périphrase. Pour les procédés rhétoriques : la tirade, la diatribe, le discours humoristique, conter une histoire et le discours dit « éloquent ».
Auteur : Grégoire Lecocq, président de Réunion & Décision Citoyenne


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